La musique des Sphères
Écoutez l’espace avec la Musique des sphères.
Rien que le nom fait rêver. Dans « Le Dernier Temps », l’Officier Hammer, « oreille d’or » des bruits de l’espace, évoque cette musique. Ami(e)s lecteurs et lectrices, férus de musique, d’astronomie, de mystères, ouvrez vos yeux et vos oreilles… quelques mots pour vous emmener en voyage…
Un peu d’histoire
Dans l’Antiquité, la séparation des Sciences et des Arts n’existait pas. Musique, astronomie, mathématiques, optique, sculpture, philosophie se rejoignaient pour concourir à la compréhension du monde. Et le monde était harmonie, perfection.
Dans cette logique, les planètes connues (Soleil, Lune, Mercure, Vénus, Mars, Saturne et Jupiter) étaient des sphères parfaites tournant de manière harmonieuse et régulière autour de la Terre, le tout évoluant dans un monde clos. 7 planètes, à l’époque, … et 7 notes de musique !
< Sphère armillaire servant à modéliser la sphère céleste
Pythagore (oui, oui, vous ne nous trompez pas, celui du théorème !) imagina que les distances entre les planètes étaient réparties selon des proportions musicales correspondant à des intervalles musicaux. De plus, chaque planète émettait une note et un son continu. Tous ces sons produisaient une harmonie ; le cosmos était une échelle musicale. D’après Platon, nous, pauvres humains, étions affectés par ces sons célestes, inaudibles à notre oreille.
Cela ne vous rappelle rien ? Vagues souvenirs de philo en Terminale, Mmm ? À moins que vous l’école ne vous fut buissonnière ? C’est le mythe de la caverne versus musical : les hommes n’entendent et ne jouent que le pâle reflet de l’harmonie céleste.
Une si belle idée ne pouvait que traverser les siècles. Au Moyen-Âge, à la Renaissance, artistes, écrivains, scientifiques s’en emparèrent tous.
En 1619, Kepler fonda la musique céleste, non plus sur les distances entre les planètes, mais sur la vitesse des planètes.
Bon, tout le monde n’était pas d’accord. Spinoza critiqua fermement cette idée : « La folie de l’homme a atteint le point de croire que l’Harmonie est aussi Dieu ».
Représentation artistique du modèle géocentrique d’après Ptolémée, Scénographia systematis mvndani Ptolemaici, par Johannes van Loon (1611-1686) >
De nos jours
Les années passèrent, nos capacités à entendre les « sons » de l’univers s’étendirent, les découvertes se multiplièrent… Et, un jour, nos astronomes découvrent que le soleil et les étoiles se comportent comme des instruments de musique. Mais laissons la place à l’astrophysicienne Sylvie VAUCLAIR qui nous explique cela de manière… lumineuse !
Nébuleuse M17 : photographie prise par le télescope Hubble. NASA, ESA and J. Hester (ASU) >
Bon, nous sommes d’accord. Les étoiles ne font pas de musique ; de la même manière qu’une guitare, un violon ne font pas de musique. C’est le musicien qui compose, qui interprète… à l’aide d’instruments.
< La naissance du monde, in Musurgia Universalis, Athanasius Kircher, 1650
Les étoiles sont de grosses sphères de gaz qui émettent des vibrations de plusieurs sortes… et notamment des ondes sonores qui se propagent à l’intérieur de ces sphères. C’est donc de la résonnance qui se produit ; comme à l’intérieur d’une caisse de résonnance d’un instrument de musique, telle la boîte d’un violon ou d’une guitare.
Ces instruments sont composés de plusieurs parties : les cordes qui vibrent ; quelque chose qui fait vibrer ces cordes (l’archet pour le violon, la main pour la guitare) ; et la boîte, qui amplifie le son. Mais pas seulement, car il s’agit également de lui donner un timbre.
Le « timbre », c’est « l’identité » propre de l’instrument, son « son » unique. Car le son d’un instrument de musique traditionnel qu’on entend n’est jamais pur.
Nous savons différencier le « la » entre un violon et une guitare, car ce n’est pas le même timbre. Beaucoup de choses rentrent en jeu, tel l’archet. Mais le plus important est la caisse de résonnance qui permet de faire sortir certains sons et pas d’autres. Bref, il sort de cette caisse des harmoniques à certaines fréquences et avec une certaine intensité. Et ces harmoniques ne sont pas les mêmes selon les instruments. Tout cela produit le timbre.
Or les étoiles se comportent comme de grosses caisses de résonnance. Des ondes se propagent à l’intérieur et résonnent à certaines fréquences. On sait que toutes les étoiles résonnent et que chacune a sa signature particulière, son timbre particulier. Pour autant, il y a de grandes différences entre les sons des étoiles et les sons d’une caisse d’un instrument de musique. Ainsi, l’intérieur des étoiles est composé de gaz. De plus, une étoile n’est pas une sphère ; dans le soleil, il y a des protubérances pas exemple. Mais une des différences majeures est que le soleil n’est pas dans une boîte ; il n’y a pas de paroi. Mais une étoile n’a pas de besoin de boîte. Car une étoile est autogravitante, elle tient sur elle-même, grâce à son propre poids.
Une 2e différence est que les étoiles sont énormes. Le soleil a 700 000 km de rayon et son « son » (3/1000e de hertz) est beaucoup trop grave pour l’oreille humaine. En effet, notre oreille est capable d’entendre entre 20 et 30 hertz pour le plus grave et environ 30 000 hertz pour les plus aigus.
Plus les instruments sont petits, plus les sons sont aigus. Plus les instruments sont grands, plus les sons sont graves… Donc les sons d’une étoile, immense, sont extrêmement graves, en infra infra-sons…
3e différence : l’environnement des étoiles. Quand on joue de la musique, on entend la musique parce qu’il y a de l’air entre l’instrument et nous. Cet air est essentiel car les ondes sonores ont besoin d’un support matériel pour se propager, contrairement aux ondes de lumières qui se propagent dans le vide.
L’air est un excellent support matériel.
Entre les étoiles elles-mêmes, d’une part, et entre les étoiles et nous, d’autre part, il y a bien un peu de matière, les nébuleuses. Mais ces nébuleuses sont dérisoires au regard du vide immense entre les étoiles. Il y a des millions de fois plus de vide en termes de densité de matière que ce que nous avons sur la terre — Quel vertige, cet infini ! —. Donc le son ne peut pas se propager ; conséquence, on ne peut pas l’entendre.
< La comète Hale-Bopp, le 11 mars 1997. Par Geoff Chester
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